Catastrophe humanitaire en RDC

mardi 27 novembre 2012

En République démocratique du Congo (RDC) les ressources minières et agricoles font l’objet de convoitises notamment des États voisins (Rwanda, Ouganda, Burundi) et entrainent des conflits depuis une vingtaine d’année. Depuis mardi, les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) – nom qui évoque l’accord de paix du 23 mars 2009 qu’ils considèrent comme non respecté, raison pour laquelle ils ont repris les armes depuis avril - contrôlent la ville de Goma (dans l’est du pays), ont pris Sake jeudi et ont annoncé leur intention d’avancer jusqu’à Bukavu puis Kinshasa.

Statu quo malgré une pression diplomatique accrue

Malgré une première rencontre entre les deux hommes samedi, la situation semble inextricable : Joseph Kabila conditionne toute négociation au départ des rebelles de Goma, alors que le président du M23, Jean-Marie Runiga Lugerero, n’entend ce retrait que comme « le résultat » des négociations.

Pourtant les pressions diplomatiques se sont multipliées depuis mardi, jour de l’adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU de la résolution 2076 initiée par la France, condamnant la prise de Goma par le M23, prévoyant une révision du mandat et des moyens de la MONUSCO et demandant l’ouverture d’une enquête sur des soutiens présumés du Rwanda et de l’Ouganda à cette rébellion, que tous deux nient. Samedi, le sommet de Kampala réunissant les chefs d’État congolais, ougandais, Kenyan et tanzanien, a abouti à une déclaration finale demandant au M23 d’évacuer Goma et ses positions stratégiques dans un rayon de 20 km dans les 48H et de cesser les combats, en contrepartie de quoi Joseph Kabila s’engage à prendre en compte les revendications des rebelles. Appel relayé par leurs homologues rwandais et du Congo-Brazzaville, puis dimanche par Ban Ki-Moon ainsi que par la présidente de la commission de l’Union africaine (UA), Nkosazana Dlamini Zuma. Mais celle-ci fait part de « la grande préoccupation de l’UA sur l’aggravation de la situation humanitaire sur le terrain et les abus commis contre la population civile ».

Le drame humanitaire de RDC

Dès mercredi, Yamina Benguigui, ministre française déléguée à la Francophonie, pointait « un conflit tragique, humanitaire, où les femmes sont devenues des butins de guerre, elles sont un champ de bataille où on les massacres et viole à satiété ». Elle indiquait que les exactions visant les femmes, avec le viol comme arme de guerre, s’étaient multipliées après la fuite des réfugiés de leurs camps autour de la capitale du Nord-Kivu. Ce lundi, rappelant que ce « conflit oublié et sans image » a fait « plus de 8 millions de morts depuis 1994 », (International Rescue Committee estime, dans son rapport de 2007, le nombre de morts liées au conflit depuis 1998 à 5,4 millions) elle lance « l’appel de Goma » dans 20 Minutes, un « appel aux consciences pour que les femmes et les enfants du Nord-Kivu cessent d'être des butins de guerre. »

Outre le calvaire de ces femmes et de ces petites filles, World Vision évoque les risques d’enrôlement forcé des enfants dans des groupes armés et un autre risque important guette des dizaines de milliers de personnes sans cesse déplacées : « l’insécurité alimentaire, aggravée par le climat d’extrême violence » selon un de ses représentants, Mugunga Dominic Keyser. Selon le bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires, on compte 1,6 millions de déplacés dans le Kivu et le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés, qui ne peut plus accéder à la plupart des camps de déplacés, est « vivement préoccupé par [leur] situation » et les violences qui les affectent. À cela s’ajoute notamment le risque d’épidémies, tel que le choléra, suite à la pénurie d’eau et d’électricité à Goma selon Oxfam, pour qui 120 000 personnes nécessiteraient une aide d’urgence au Nord-Kivu. L’analyse de l’International Crisis Group n’est pas de nature à rassurer : « la capitulation de Kinshasa face au M23 risque de provoquer une onde de choc dans les Kivus et de relancer une dynamique de guerre entre la RDC et le Rwanda ».

Anne-Laure Chanteloup

Crédit Photo : Aurélie Baumel/AZG-MSF

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