Ministre de l'Agriculture et de l'agroalimentaire : Qui est Stéphane Le Foll ?

mardi 5 juin 2012

Du haut de son mètre 90 et dans la carrure de ses épaules de déménageur, on le croirait tout droit sorti d’un film d’Audiard père, coincé entre Gabin et Ventura. Le nouveau ministre de l’agriculture est tout autant  réputé pour sa fidélité à François Hollande que pour sa rudesse. Né le 3 février 1960 au Mans, ce proche de François Hollande est petit fils d’agriculteur. Il est d’ailleurs titulaire d’un BTS agricole mais s’oriente ensuite vers un DEA d’économie qu’il obtient en 1988 à l’université de Nantes. Par la suite, il obtient aussi un diplôme professionnel spécialisé au Conservatoire national des arts et métiers. Au sortir de la fac, il choisit d’enseigner en premier au lycée agricole de Rouillon puis au lycée de La Ferté-Bernard, avant d’occuper les fonctions de chargé de cours à l’Université de Nantes.

 

 Un engagement politique précoce

Stéphane Le Foll démarre une carrière politique précoce. En 1983, il est élu conseiller municipal de Longnes. Il a alors 23 ans et restera à ce poste jusqu’en 1995, année où il devient conseiller municipal du Mans et vice-président de la communauté urbaine Le Mans Métropole, à l’eau et à l’assainissement puis aux finances, à partir de 2001. Mais son engagement au parti socialiste s’affirme surtout  à partir de 1991 où il devient l’un des permanents du siège du Parti, à Paris.

C’est là qu’en 1994, il rencontre François Hollande. Les deux hommes sont vite proches et Stéphane le Foll devient le directeur de cabinet de François Hollande à partir de 1997 et le reste jusqu’en novembre 2008. Cité par le journal Le Parisien le 27 avril 2012,  Bernard Poignant, maire de Quimper disait de Stéphane Le Foll : « Au QG de la rue de Ségur [adresse du QG pour la campagne  présidentielle], il est l’homme de François. Pour Hollande, Stéphane est l’homme de toujours, de tout le temps, de tous les temps ». En tous les cas, Stéphane Le Foll est un fidèle incorruptible. Il suit alors le futur Président de la République dans ses fonctions : à la tête du Parti Socialiste de septembre 1997 à novembre 2008, comme membre du Conseil national depuis 2001, puis en tant que secrétaire national à la coordination de 2003 à 2005, et enfin membre du Bureau national depuis 2007.

En juin 2002, il décide de se présenter aux élections législatives dans la quatrième circonscription de la Sarthe contre François Fillon. Mais l’ancien premier ministre l’emporte avec 55,21 % des suffrages. Il finit par vaincre deux ans plus tard mais il est élu député européen dans la circonscription Ouest. Là, il ne ménage ni son effort ni son intérêt et s’engage dans plusieurs commissions du parlement européen. Il devient membre au Parlement européen de la Commission de l’agriculture et du développement rural, ainsi que de la délégation pour les relations avec le Conseil législatif palestinien mais fait aussi parti de la délégation du Parlement européen aux négociations de l’Organisation mondiale du commerce à Hong Kong en 2005.

En vérité, le poste de député européen lui convient bien et il est réélu député européen le 7 juin 2009. C’est lors de ce mandat qu’il est nommé vice-président du groupe de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen du 24 juin 2009 au 17 janvier 2012. Mais l’agriculture demeure son principal centre d’intérêt et après avoir créé en 2006, avec Edgard Pisani et d’autres chercheurs, le groupe Saint Germain, un groupe de réflexion sur les politiques alimentaires et agricoles visant à repenser le projet agricole, il rédige en 2010, un  rapport sur l’agriculture et le changement climatique. Chanceux aux élections européennes, il continue cependant à jouer de malchance aux élections législatives. Candidat à la députation pour les élections législatives de juin 2007, il est à nouveau  battu au 1er tour, par François Fillon alors tout frais nommé Premier ministre. Ce dernier obtient obtenant 53,39 % contre 30,02 % des suffrages pour Stéphane Le Foll.

Le 20 novembre 2008, il est élu premier secrétaire fédéral du Parti socialiste de la Sarthe. La même année, il fonde et préside l’association « Répondre à Gauche », soutenant François Hollande. De lui, le président de la République confiait au Parisien le 27 avril 2012 : « Au PS, nous nous complétions très bien : je suis petit, il est grand, il était très dur et moi je suis plutôt souple. Mais les durs d’apparence sont parfois sensibles, et les souples… inflexibles! ». En bref, le complément idéal du nouveau président. D’ailleurs, lors de la primaire présidentielle socialiste de 2011, Stéphane Le Foll est nommé illico, directeur de campagne de François Hollande et le 17 novembre 2011, il est désigné responsable de l’organisation de la campagne pour l’élection présidentielle de 2012.

 

Un spécialiste des dossiers agricoles à Bruxelles

C’est bien naturellement que ce spécialiste des politiques agricoles est nommé le 16 mai 2012, ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire dans le gouvernement Jean-Marc Ayrault. Son intérêt pour l’agriculture ne se dément pas au fil des années et en juin 1997, il passe  par la rue de Varenne où il est nommé conseiller technique après du ministre de l’agriculture de l’époque, Louis Le Pensec. Il n’est pas surprenant dès lors que ce breton  soit aussi un habitué des Controverses de Marciac, un rendez-vous national et européen pour instruire et débattre des sujets qui interpellent la  société : le futur de l’agriculture, l’évolution de notre alimentation, la transformation des territoires ruraux, les relations urbain-rural, le rôle des sciences du vivant.

Pour toutes ces raisons, il reste la personnalité du PS qui connait le mieux les questions agricoles au niveau européen. Et dans cette optique sa nomination est tout de suite apparue comme « normale » et « naturelle » au regard des négociations communautaires sur la réforme de la PAC et sur le budget prévues fin 2012 début 2013. L’élargissement de son portefeuille à l’agroalimentaire est un signal envoyé à la FNSEA qui réclamait un périmètre d’intervention qui aille de l’amont jusqu’à l’aval.

 

De futures élections qui vont sceller l’avenir du ministre

L’avenir de Stéphane Le Foll n’est pourtant pas encore scellé puisqu’il reste suspendu aux élections législatives de juin. Jean Marc Ayrault avait en effet annoncé le mercredi 16 mai 2012 que les ministres battus aux législatives ne pourraient « pas rester au gouvernement ».  L’enjeu est de taille pour Stéphane Le Foll mais le ministre n’a pourtant pas hésité à se lancer dans la bataille. Il avait confié à l’AFP que ne pas se jeter dans cette bataille après les campagnes de 2002 et de 2007 était « impensable ». Il ajoutait : « Mais, si je reste ministre, je ne serai pas absent de cette circonscription. Parce que j’y habite depuis 50 ans ».

Il sera donc candidat aux législatives en juin 2012 dans la 4ème circonscription de la Sarthe avec un changement notable : il n’aura plus comme concurrent François Fillon désormais « parachuté » à Paris. En cas de victoire du ministre de l’agriculture, c’est sa suppléante Sylvie Tolmont qui siègera à l’assemblée nationale. Âgée de 49 ans, salariée de la chambre de commerce de d’industrie de la Sarthe, conseillère municipale de Fay depuis 2008, maire-adjointe depuis janvier 2012, Sylvie Tolmont a été très engagée dans la campagne présidentielle. « J’ai fait le choix de la parité, a expliqué Stéphane Le Foll à l’AFP. À l’image du gouvernement de François Hollande, le premier de la Ve République à compter autant de femmes que d’hommes ». Politique jusqu’au bout, il ajoute que « le candidat UMP [Marc Joulaud] n’a pas fait ce choix »…


Véronique Pierron

Laisser un commentaire