Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

lundi 21 mai 2012

Jean-Marc Ayrault est le Premier ministre du gouvernement depuis mai 2012, nommé par François Hollande après son élection à la présidence de la République. Président du groupe socialiste à l'Assemblée nationale depuis 1997, il figure parmi les plus anciens élus socialistes. Considéré comme un homme sérieux et discret, timide pour les uns, austère pour les autres, il s'implique très tôt dans la vie politique régionale puis nationale. Sa constance à ces deux niveaux d'administration et la densité de son cheminement politique lui ont conféré une stature d'homme d'Etat.

Jean-Marc (Joseph, Marcel) Ayrault est né le 25 janvier 1950 à Maulévrier, dans le département du Maine-et-Loire. Il est le fils de Joseph Ayrault (né en 1921), ancien ouvrier agricole puis textile avant d'embrasser des fonctions d'encadrement, et de Georgette Uzenot (née en 1928), couturière. Aîné d'une fratrie de cinq enfants, il est issu d'une famille catholique où priment les valeurs de travail et de rigueur.

L'actuel chef de gouvernement adhère rapidement à des mouvements politiques de jeunes chrétiens, initialement au sein du Mouvement rural de la jeunesse chrétienne de sa ville natale. Ce courant, marqué par une vision libératrice de la religion au milieu des années 1960, semble avoir joué un rôle essentiel dans sa formation politique, par l'adoption notamment de certains principes marxistes comme outils d'analyse de la société. Il rejoint ensuite la Jeunesse ouvrière chrétienne puis, enfin, l'Action catholique ouvrière.

Son premier mentor politique, Bernard Hazo, est membre de la Convention des institutions républicaines. Créée par François Mitterrand, cette dernière jouera un rôle essentiel dans la préparation du Congrès d’Epinay de 1971, au lendemain duquel Jean-Marc Ayrault adhére au Parti socialiste (PS) dans la section de Saint-Herblain. Il en devient le secrétaire dès 1974.

Ses études supérieures à la faculté des lettres de Nantes lui permettent d'obtenir un CAPES d'allemand en 1973 et d'enseigner cette langue jusqu'en 1986. Il entame son envol d'élu politique en 1976, à 26 ans, comme conseiller général de Saint-Herblain, jusqu'en 1982. Il est, dès l'année suivante, élu maire de cette ville, jusqu'en 1989, devenant ainsi le plus jeune chef de France d'une commune de plus de 30 000 habitants.

L'ancrage de Jean-Marc Ayrault dans la vie politique locale est définitivement consolidé après son élection en 1989, dès le premier tour, à la mairie de Nantes. Cette ville, initialement aux mains de la droite, le reconduira à la tête du Conseil municipal à trois reprises en 1995, 2001 (là encore dès le premier tour) et 2008. Véritable carte de visite de son action politique locale, la cité des Ducs lui confèrera une grande visibilité nationale. La fermeture des chantiers navals quelques années avant sa première élection lui donne l'occasion de remodeler durablement l'image de la métropole régionale. Il construit également, de façon progressive, le projet de la Communauté urbaine de Nantes, rebaptisée Nantes Métropole, dont il est président depuis 2002. Il retirera un bilan positif de son action globale, difficile à condamner par l'opposition.

Siégeant au comité directeur du PS depuis 1979, et au bureau exécutif national depuis 1981, il se rallie à Lionel Jospin à partir de 1994. Ce dernier l'affecte en 1997, en accord avec François Hollande, à la présidence du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, charge qu'il conservera jusqu'à sa nomination à l'actuel poste de Premier ministre. Jean-Marc Ayrault se rallie dans la foulée à Lionel Jospin, jusqu’à ce que celui-ci décide de quitter la scène politique française en 2002 après sa défaite au premier tour de l'élection présidentielle.

Caressant un destin de représentation nationale, le chef de gouvernement en exercice se tourne alors vers la Chambre basse, où il est élu député de Loire-Atlantique en 1986, avant d'y être réélu à cinq reprises jusqu'en 2007. Sa réélection en 2002 se fera, là encore, dès le premier tour.

Jean-Marc Ayrault se prononce en septembre 2006 pour la candidature de Ségolène Royal à la campagne présidentielle de 2007, qu'elle perdra face à Nicolas Sarkozy. Le maire de Nantes prend ensuite ses distances avec elle dès 2008, soutenant la motion de Bertrand Delanoë durant le congrès du PS à Reims. Considéré également comme un fidèle de François Hollande, il soutient ce dernier au cours de l'élection primaire socialiste de 2011 face à Martine Aubry, avant de participer activement à sa campagne présidentielle comme conseiller spécial. Le plébiscite de l'actuel président de la République avec 51,67% des voix au second tour plaidait pour la nomination d'une personnalité consensuelle, susceptible de rassembler les Français. Jean-Marc Ayrault commence ainsi à être considéré comme l'un des favoris pour le poste de Premier Ministre. Sa réputation d'homme attentif aux autres, ne faisant pas de distinction entre ses interlocuteurs, quelles que soient leurs origines, a notamment joué en sa faveur.

L'ancien premier magistrat de la cité des Ducs avait lui-même annoncé qu'il ne cumulerait pas les mandats s'il était appelé à des responsabilités ministérielles. Son premier adjoint à la mairie de Nantes, Patrick Rimbert, et successeur désigné depuis longtemps, l'a remplacé à la tête de la municipalité nantaise après sa nomination à Matignon. Ce dernier envisage par ailleurs de mettre fin à sa carrière politique en 2014, année des prochaines élections municipales. Cette perspective présente l'avantage pour l'actuel chef du gouvernement, selon ce que sera son parcours à l'Hôtel Matignon, de pouvoir briguer un nouveau mandat qui le réinstallerait à la tête de la ville de Nantes.

 

Amateur de John Le Carré, un de ses auteurs favoris, et de Frédéric Dard, créateur de San-Antonio, Jean-Marc Ayrault affiche un attrait pour le cinéma d'auteur. Il ne s'interdit pas toutefois de craquer pour le film Coup de foudre à Notting Hill, bluette sentimentale légère obéissant à un romantisme convenu. /// Sa mèche rangée et son apparente froideur, qu'il préfère qualifier de timidité, n'empêchent pas l'ancien député-maire de Nantes d'apprécier "les bons repas entre amis", l'actuel président de la République allant jusqu'à le qualifier de "bon vivant". Ce partisan du "zéro sport" préfère toutefois éviter les desserts, synonymes d'embonpoint. /// Amateur de contrepèteries, ce fidèle de François Hollande n'hésite pas, dans son bureau municipal, à triturer un cochon rose anti-stress en caoutchouc. Et avoue avoir un faible pour les vacances en camping-car, en compagnie de sa femme.

 

Président de l’Association des maires de grandes villes de France au milieu des années 1990, Jean-Marc Ayrault est également vice-président du Groupe d'amitié franco-géorgien et secrétaire du Groupe d'amitié franco-allemand. L'actuel chef de l'Hôtel Matignon s'est en outre fait remarquer en 2008 en accueillant le Dalaï-Lama, leader spirituel du Tibet et prix Nobel de la Paix, dans sa ville, où le roi Henri IV ratifia l'Edit de Nantes en 1598, symbole de la liberté de culte.

L'ancien président du Groupe socialiste à la Chambre des députés, qui avait joué un rôle important dans l'adoption du Pacte civil de solidarité voté en 1999, se prononce aujourd'hui pour la ratification d'une loi en faveur du mariage homosexuel.

Nantes Passion, le journal municipal au budget d'impression annuel de près d'un million d'euros à la fin des années 1990, aura soulevé d'autres ardeurs que celles attendues par Jean-Marc Ayrault. Ce dernier, après avoir été mis en examen pour "non-respect du code des marchés publics" a en effet été condamné pour favoritisme, en 1997, à six mois de prison avec sursis et à plus de 4 500 euros d'amende. Il avait octroyé, pendant deux années consécutives, le marché d'impression de la revue nantaise sans mise en concurrence, ni recours à des appels d'offres, ni réalisation de contrat. Cette condamnation aurait pu empêcher la nomination de Jean-Marc Ayrault, François Hollande ayant clamé, en avril 2012, son souhait d'une République "irréprochable".

Le futur Aéroport du grand Ouest demeure toutefois le projet le plus épineux de l'ancien maire de Nantes. Prévu pour être construit en 2017 à Notre-Dame-des-Landes, commune de moins de 2 000 habitants située à 30 km au nord de la métropole régionale, il cristallise une vive opposition générale malgré sa validation par l'Etat et son soutien à la fois par le PS et l'Union pour un mouvement populaire. Contesté notamment par le MoDem, Europe Ecologie-Les Verts et le Parti de Gauche, avec l'appui de nombreuses associations locales et celui de la Confédération paysanne, ce projet au coût total annoncé de 561 millions d'euros implique entre autres dommages la disparition d'exploitations agricoles et de 98% de terres classées "zone humide". Saisie par les habitants de la commune, la Cour européenne de justice pourrait s'opposer à la dégradation de ces réserves de biodiversité.

La procédure d'expropriation des propriétaires et exploitants situés sur la zone de concession du futur aéroport, ayant refusé un accord amiable, a pris effet en janvier 2012. Elle a conduit certains opposants au projet à entamer une grève de la faim, environ deux semaines avant le premier tour de l'élection présidentielle, grève qui dura pendant près d'un mois. Trois jours avant le second tour du scrutin, François Hollande, regrettant que le projet d'aéroport soit devenu "un sujet de fixation", lance un appel à "ouvrir une discussion et une concertation". Moins d'une semaine plus tard, le Conseil général de Loire-Atlantique, le Conseil régional des Pays de la Loire et la ville de Nantes émettent le souhait "qu'il n'y ait pas d'expulsion avant la fin des recours déposés […]". L'actuel locataire de la rue de Varenne s'empressait d'ajouter, peu de temps après que le texte commun ait été transmis à la presse : "c'est un signe de dialogue, ça ne veut pas dire que le projet est abandonné ".

L'ancien premier magistrat de la cité des Ducs a également contribué à la renommée culturelle de sa ville. Il y a développé, pour ne parler que des réalisations les plus connues, des infrastructures telles que le Lieu unique ou les Machines de l'Île, rénové des musées, encouragé l'ancrage de compagnies telles que Royal de Luxe ou encore pérennisé des festivals comme celui de l'Estuaire ou des Trois continents. Certains de ses opposants lui reprochent toutefois de préférer une culture "événementielle" à une culture de fond.

Jean-Marc Ayrault a par ailleurs œuvré à l'établissement d'une mémoire permanente du passé négrier de Nantes. Un Mémorial de l'abolition de l'esclavage y a été inauguré en mars 2012, rappelant que la première ville négrière de France, opposée à l'arrêt de la traite d'esclaves au XIXe siècle, fut aussi la dernière à armer des bateaux à cet effet.

Jean-Marc Ayrault est marié depuis 1971 à Brigitte Terrien, qu'il épouse alors qu'elle est encore étudiante en Lettres modernes. Originaire de Maulévrier et enseignante comme son époux, elle donnera naissance à deux filles : Ysabelle, en 1974, et Elise, en 1977. L'actuel Premier ministre a également une petite-fille, Sarah, née en 2006. Brigitte Terrien s'est par ailleurs vue confier la charge de conseillère générale du canton de Saint-Herblain-Ouest-Indre de 1982 à 2001. Elle remplaçait son mari, alors nouvellement élu maire de Saint-Herblain en 1982.

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