Retour aux personnalités

Offical

Nom: Frédéric Mitterrand
Position actuelle: Ministre de la Culture

Frédéric Mitterrand est un homme à multiples casquettes : scénariste, animateur de télévision, producteur-réalisateur de documentaires et de longs métrages, directeur de l'Académie de France à Rome, écrivain. Le 23 juin 2009, il est nommé ministre de la Culture et de la Communication par Nicolas Sarkozy.

Né le 21 août 1947 à Paris 16e, il est le fils de Robert Mitterrand, ingénieur, et d’Edith Cahier ; mais il est plus connu comme étant le neveu de François Mitterrand (Président de la République de 1981 à 1995).

A douze ans, il apparaît pour la première fois à l’écran sous le nom de Frédéric Robert dans le film Fortunat aux côtés de Michèle Morgan et de Bourvil. Il joue le fils d’un chirurgien arrêté par la Gestapo en France en 1942. Frédéric Mitterrand garde un bon souvenir du tournage. En 2010, alors que Michèle Morgan souffle ses 90 bougies au Fouquet, il vient lui rendre hommage. Il l’appelle sa « maman de cinéma » ; elle le surnomme son « petit Frédéric ». D’un même chœur, ils célèbrent ce jour-là, les louanges de Bourvil. Mais il avoue : « Hélas, j'étais mauvais acteur et je n'ai pas continué. »

Apres avoir suivi des études au Lycée Janson de Sailly, il obtient une licence d’histoire et de géographie à la Faculté de Nanterre. En 1968, il sort diplômé de l'Institut d'Études Politiques (IEP) de Paris dans la section service public. Il passe ensuite un doctorat d'histoire et géographie tout en exerçant pendant trois années le métier de Professeur d'économie, d'histoire et de géographie à l'Ecole bilingue de Paris. Mais il abandonne rapidement l’enseignement pour se consacrer à sa passion : le cinéma et la télévision.

En 1971, Frédéric Mitterrand entame une carrière de gérant de salles de cinéma. Il dirige la salle Olympic dans le 14eme, qu’il rachète par la suite ; puis l’Olympic Palace qu’il restaure. En 1975, il crée un réseau d’une dizaine de salle Art et Essai, puis ouvre l’Olympic-Entrepôt en 1977. Deux ans plus tard, il reprend le Bilboquet et change son nom en Olympic Saint-Germain, ainsi que Les 3 Luxembourg de Charles Rochman en 1983, qu’il rebaptise Olympic-Luxembourg. Entre 1980 et 1984, il travaille également aux côtés de Jean-Jacques Schpoliansky au Balzac.

A cette période, Mitterrand apparaît comme un cinéphile dandy, avec son foulard violet et son gros cigare, patron médiatique de salles de cinéma d'art et d'essai ; « affectif, drôle, intelligent, cultivé, il séduisait déjà tout le monde », se souvient son ancien collaborateur Jean Hernandez. Il se permet une programmation ambitieuse, de Pasolini à Duras, des comédies musicales égyptiennes aux grands films hollywoodiens. Pour les 10 ans de sa société, il loue l'Olympia et apparaît devant le tout-Paris, perché sur un trapèze, déguisé en Lana Turner. C'est l'apothéose, mais aussi le début de la fin. La fin d'une passion amoureuse avec un de ses collaborateurs, dont il fera son film, Lettres d'amour en Somalie (en 1981). La fin d'un cauchemar financier dont il n'aime pas parler, mais qui le laisse ruiné et endetté pour quinze ans.

Au début des années 80, il se lance dans une nouvelle carrière de producteur, réalisateur et animateur d'émissions de télévision. Doté d'une voix lasse et nasillarde, et passionné autant par le gotha mondain et les grands personnages historiques que par le cinéma, Frédéric Mitterrand réalise et/ou présente de nombreuses émissions de cinéma ou consacrées aux grands de ce monde. Il fait ses débuts sur TF1 mais il est remercié par la chaine en 1988. Il dit en avoir « beaucoup souffert ». Il rejoint alors Antenne 2. On lui doit entre autres Etoiles et toiles (1981-86), Ciné-Fêtes (1984), Acteur Studio (1986-87), Permission de minuit (1987-88), Destins (1987-88), Du côté de chez Fred (1988-91), Bonjour la télé (1988-89), Etoile Palace (1990), C'est votre vie (1993-94), Les Amants du siècle (1993-94), Caravane de nuit (1994), Ciné-Club (1996), Légendes du siècle (1996-97), Les Aigles foudroyés (1997), Cercle des arts (1997-98), Mémoires d'exil (1999), Hymne à la voix (1999), Plaisirs de France (2001), 24 heures en direct de (2002), etc. Il devient également l'un des commentateurs attitrés des cérémonies royales sur le petit écran.

La télévision se révèle un bon outil pour regagner l'argent perdu et faire connaître ses dons de conteur. Frédéric Mitterrand subjugue ou énerve, mais ne laisse pas indifférent avec son style précieux, ses génériques nostalgiques et ses périphrases extatiques. Ses collaborateurs ont souvent admiré la facilité incroyable avec laquelle il écrit. Avec lui, un tramway se transforme en un « jouet mécanique pour simulacre de voyage au long cours et supplément de charme pour panoplie de cité moderne. » Mais on lui reproche son manque de recul, notamment sur son portrait flatteur du shah d'Iran. Il répond qu’il n'est pas historien. Il se surnomme avec autodérision « le Shakespeare des supérettes».

L’autodérision, l’auto-caricature sont, en effet, deux grands traits de sa personnalité. Monsieur « bonsoooarr » jubile lorsqu'il « interviewe » deux chaises vides pendant toute une émission parce que ses invités, Juliette Binoche et Léos Carax, se disputent en coulisses. Mais c’est aussi quelqu’un de sensible, qui plus jeune était introverti, complexé et décalé dans sa sexualité. Il dit que la télévision a nourri son « besoin d’être admis et regardé» ; mais il y a rencontré beaucoup de « monstres, surtout féminins : en face, je devenais un paillasson, je faisais la roue, je déprimais, j'étais malheureux », raconte-t-il. « Frédéric est un affectif qui s'est pris des claques, se fait systématiquement refiler les bébés chats et les voitures pourries parce qu'il ne sait pas dire non», sourit un vieil ami. « Mais il a aussi un vrai goût de la catastrophe ! Et endosse avec facilité l'habit de victime quand il raconte sa vie. » 

On le sait aussi capable de coups d’éclat, comme lorsqu’en 1990, il dépose par terre son Sept d’or (de la meilleure émission de divertissement pour Carte Blanche), afin de protester contre l'état du service public. Ce que l’on sait moins, c’est que le lendemain il envoyait ses excuses au président de la chaîne : « J'étais allé trop loin. »

Mais à force d’accumuler les soirées starlettes, des émissions de variété ratées et des publicités lucratives, Frédéric Mitterrand passe de mode. Trop cultivé et vieille France pour les people, trop paillettes et dilettante pour les « cultureux », il est boudé par le public.

Cependant l’actuel ministre de la culture a toujours su rebondir. Certes, il n'arrive plus à vendre ses documentaires, se dit « blacklisté » chez Arte, ne vient plus sur France Télévisions qu'invité par Fogiel et pour présenter le cinéclub ; mais il continue ses interviews intimistes, parfois mielleuses souvent émouvantes, sur Match TV et Europe 1.

En 1997, il se lance, en effet, dans la radio. Il anime une émission littéraire sur Europe 1 jusqu’en 2006 ; et de 2002 à 2006, l'émission d'entretiens Ça me dit sur France-Culture. Il fait aussi dans la presse écrite et pige pour Télé Poche et Têtu.

Homosexuel militant, il collabore également à la chaîne Pink TV où il présente en 2005, l’émission Ca s’est passé comme ca.

De 2003 à 2005, à la demande de son ami Serge Adda, président de TV5, il dirige les programmes de la chaîne française à destination des francophones de l'étranger.  « Son nom nous fait de la pub, mais on pensait que le poste serait bidon. En fait, il travaille vraiment,» commente un salarié. Il séduit même. « Il a un incroyable charisme, il est psychologue, sait écouter les gens et utiliser leurs défauts », témoigne une collaboratrice.

Tout au long de sa carrière, Frédéric Mitterrand produit également plusieurs films et documentaires. Il joue son propre rôle dans Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet (2001). Il écrit aussi quelques livres, dont La Mauvaise vie en 2005, une autobiographie en deux volumes où il fait son coming out. Le livre connaît un beau succès avec près de 180.000 exemplaires vendus au moment de la sortie en librairie.

Il occupe, par ailleurs, diverses responsabilités comme Commissaire général de la saison tunisienne en France en 1996, de l'année du Maroc en 1999 et de la Saison tchèque en 2002. Au Centre National de la Cinématographie (CNC), il préside la Commission Fonds Sud de 1998 à 2000  et la Commission d'avance sur recette de 2001 à 2003.

Sur le plan politique, Frédéric Mitterrand est difficilement étiquettable. Grand admirateur des monarchies et des royautés, fasciné par De Gaulle, il a soutenu pendant un temps son oncle socialiste François Mitterrand, puis a adhéré en 1993 au Mouvement Radical de Gauche (MRG) avant de plébisciter deux ans plus tard la candidature de Jacques Chirac à la présidence de la République. Il ne prend pas position lors de l’élection présidentielle de 2007.

En juin 2008, il est nommé directeur de l'Académie de France à Rome (Villa Médicis) par Nicolas Sarkozy. Mais il fait rapidement part de son ennui à ce poste.  Un an plus tard, le Président le propulse au poste de Ministre de la Culture en remplacement de Christine Albanel, affaiblie par la censure partielle de la loi Hadopi contre le piratage sur Internet.

Mais Frédéric Mitterrand fait des débuts maladroits. Il ne respecte ni le protocole ni les usages. Il agit et réagit plus en artiste passionné et en électron libre, notamment de sa parole, qu'en politique pour qui chaque mot, chaque visite de musée compte. « Il est si heureux d'être là », s'en amuse Jack Lang, ex-ministre de la Culture de François Mitterrand, qui l'aime bien.

Le premier couac intervient avant même sa nomination. Il a tellement envie de confier sa joie à son équipe de la Villa Médicis, qu'il devance l'annonce du remaniement ministériel. Rebelote en septembre 2009, lorsqu’il donne le nom de son successeur à la Villa Médicis, Eric de Chassey, dans un entretien au quotidien italien La Stampa… une fois de plus, avant le communiqué officiel de l'Elysée.

Frédéric Mitterrand est imprévisible. Il bouscule son agenda pour un article lu dans la presse ou un conseil livré par un ami. Il lui suffit d'entendre le chef d'orchestre Hervé Niquet à la radio pour qu'il décide de faire un saut au festival baroque de Saintes.

En septembre 2009, il apporte son soutien total au réalisateur Roman Polanski qui, poursuivi aux Etats-Unis depuis 1977 pour une affaire de crime sexuel et délit de fuite, est arrêté en Suisse sur mandat d’arrêt américain. Le ministre juge « absolument épouvantable » l'arrestation du cinéaste « pour une histoire ancienne qui n'a pas vraiment de sens. » Il suscite immédiatement la colère d'associations de victimes, telle que « Innocence en danger » qui le somme de s'expliquer sur ce qu'elle juge comme des propos complaisants à l'endroit d'un crime sexuel, d’autant plus que la jeune fille violée était, à l’époque, une mineure de 13 ans. Il provoque l’indignation et l’incompréhension de certains hommes politiques et de la presse étrangère, notamment anglo-saxonne.

Le cas Polanski rend le terrain propice aux attaques de Marine Le Pen un mois plus tard. Le 5 octobre 2009, la dirigeante du Front National l’accuse, lors d'un débat télévisé consacré à la récidive chez les délinquants sexuels, d’avoir pratiqué le « tourisme sexuel » et trouvé du plaisir à « payer des petits garçons thaïlandais. » Elle se sert, de façon déformée et hors contexte, d’extraits de son autobiographie La Mauvaise Vie parue en 2005 pour l’attaquer. Mitterrand réfute au journal de TF1 de Laurence Ferrari, avoir eu des relations sexuelles avec des mineurs et condamne avec fermeté tout tourisme sexuel et acte de pédophilie. S’il semble convaincre une majorité de personnes, l’ouvrage lui est toutefois régulièrement rappelé par des opposants politiques ; notamment quelques jours plus tard, lorsqu’une lettre révèle qu’en 2008 il est  intervenu en sa qualité de directeur de la Villa Médicis pour se porter témoin de moralité en faveur de deux jeunes - dont son filleul - impliqués dans une histoire de viol.

Il se fait alors médiatiquement plus discret jusqu'à la fin de l'année. Mais on ne peut s’empêcher de remarquer le nombre élevé de départs du ministère à cette époque. En décembre 2010, de l'équipe de 20 conseillers annoncée en août 2009, 10 ont quitté la maison. Diverses excuses sont avancées mais selon la rumeur, certains ont du mal à supporter le régime Mitterrand. « Il a de bonnes intuitions, le suivi est plus... disons difficile, ose un ancien. Enthousiaste un jour, il lui faut tout, tout de suite. Le lendemain, il est ailleurs. »

Cependant, le ministre connaît également quelques succès. Un des premiers dossiers qu’il doit gérer est le vote très controversé de la loi Hadopi, qui a couté son poste à Christine Albanel. Pendant les discussions, beaucoup pensent qu’il a allié précision technique et verve rhétorique, ce que n'avait pas réussi à faire son prédécesseur. En octobre 2009, il décide de restituer cinq fragments de fresques issus d’un tombeau égyptien acheté par le Louvre, alors que des doutes sérieux étaient nés sur la légalité de leur sortie du territoire égyptien. Il gère également sans problème  la mise en place de la nouvelle organisation du ministère ; et il réussit à garder le budget de la Culture au moins stable, si ce n’est en légère hausse.

Frédéric Mitterrand est reconduit le 14 novembre 2010 à son poste de ministre de la Culture et de la Communication. Mais dès les premiers mois de 2011, il ne cesse de faire parler de lui : le scandale Céline, l’éviction d’Olivier Py de l’Odéon…et surtout ses liens avec l’ancien président tunisien Ben Ali.

Le ministre de la culture fait partie des nombreux responsables français qui ont fait preuve de complaisance envers le dictateur tunisien alors qu’il réprimait sauvagement le mouvement populaire de contestation en janvier 2011. Pis, il avait jugé « tout à fait exagéré » de qualifier la Tunisie de Ben Ali de « dictature univoque ». Ces propos ont déclenché, en France comme en Tunisie, stupeur et consternation. Un peu plus tard, Frédéric Mitterrand fait volte-face et présente ses excuses au peuple tunisien dans une lettre ouverte publiée le 23 janvier par l'hebdomadaire de Tunis Réalités. « Alors que le peuple tunisien est parvenu par ses seules forces à se débarrasser de la chape de plomb qui pesait sur lui, je regrette profondément que mon attitude et les expressions qu'il m'est arrivé d'utiliser aient pu offenser des gens que j'ai toujours voulu aider et que j'admire et que j'aime. » Il tente aussi de justifier la nationalité tunisienne qui lui avait été octroyée par le président Ben Ali dans les années 1990 : « Il se trouve que, sans doute, peut-être, le régime a essayé de me récupérer en me donnant la nationalité, mais je n'ai pas fait de compromis, aucun », assura-t-il sur France Inter. Mais le mal est fait. « Triste pantalonnade » est l'un des commentaires les plus charitables que l'on a pu alors lire sur les journaux tunisiens en ligne.

 

Filmographie
1960 : Fortunat
1981 : Lettres d'amour en Somalie
1984 : Paris vu par… vingt ans plus tard
1995 : Madame Butterfly, adaptation de l'opéra de Puccini
1997 : Mon copain Rachid, court métrage de Philippe Barassat, narrateur
2001 : Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet, lui-même

Télévision
Frédéric Mitterrand a produit et animé des émissions de télévision comme Etoiles et toiles (1981-1986), Acteur Studio (1986-1987), Ciné-Fêtes (1984), Permission de minuit (1987-1988), Etoiles (1987-1992), Destins (1987-1988), Etoile Palace (1990), Du Côté de chez Fred (1988-1991), C'est votre vie (1993), Les Amants du siècle (1993), Caravane de nuit (1994).


Il a reçu en 2003 le prix Roland Dorgelès (qui distingue deux professionnels de l'audiovisuel pour leur attachement à la qualité de la langue française.) La même année; il est nommé directeur général délégué chargé des programmes et de l’antenne de TV5.

Documentaires
- Deux séries sur la chute des monarchies au début du XXe siècle : « Les Aigles foudroyés », « Mémoires d'exil ».
- un film documentaire sur Habib Bourguiba.
- Fairouz, reportage-documentaire, 60 minutes (1998) - diffusion Arte ;
- Je suis la Folle de Brejnev, film documentaire, 74 minutes (2001) - coproduction France 3.

Œuvres
Mémoires d'exil, Robert Laffont, 1990
Destins d'étoiles - tomes 1, 2, 3, 4 - Fixot, 1991-1992
Monte Carlo : la légende, Assouline, 1993
Une saison tunisienne, Actes Sud, 1995
L'Ange bleu : un film de Joseph von Sternberg, Plume, 1995
Madame Butterfly, Plume, 1995
Les Aigles foudroyés - la fin des Romanov des Habsbourg et des Hohenzollern, Pocket, 1998
Un jour dans le siècle, Robert Laffont, 2000
La mauvaise vie, Robert Laffont, 2005
Lettres d'amour en Somalie, Pocket, septembre 2006
Maroc, 1900-1960 Un certain regard, Actes Sud, 2007
Le Festival de Cannes, Robert Laffont, 2007

Bookmark and Share