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Résumé:

Le service du Protocole, créé au XIXe siècle et attaché au ministère des Affaires étrangères et européennes ainsi qu’à l'Elysée met en oeuvre des règles écrites qui déterminent ce qui doit être fait pour respecter l'étiquette dans toutes les situations. Hérité de l'Ancien Régime, il fixe avec minutie la préséance, le cérémonial et les us et coutumes du pouvoir français (y compris les immunités et les privilèges des diplomates, ainsi que certaines distinctions honorifiques) et intervient dans l'organisation des déplacements à l'étranger du président de la République, du Premier ministre, des membres du gouvernement, ainsi que dans l'organisation des visites de chefs d'Etat et de personnalités étrangères en France.

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Histoire:

De l’Antiquité à nos jours, à toutes les époques et dans tous les pays, un protocole a déterminé la place et le comportement des individus ayant un rang élevé dans la société. En France, les hommes politiques ont toujours accordé une attention particulière aux préséances et honneurs qui leur sont dus.

Les rois de France signèrent de nombreux textes. Au milieu du XVIe siècle, l'édit d'Henri II, notamment, accorde aux princes du sang la préséance sur les autres princes et pairs de France dans toutes les solennités publiques.

Cependant, la date officielle de naissance du Protocole est 1585, date qui correspond à une première codification des échanges diplomatiques. La première charge d’Introducteur des ambassadeurs est alors confiée à Jérôme de Gondi par Henri III.

En 1649 paraît le Cérémonial français. Ce livre de plus de 2 000 pages décrit en détails tous les usages concernant l'ordonnancement des sacres et des couronnements, de même que les entrées solennelles dans les villes, les mariages, les naissances, les Te Deum, les réceptions du pape, des rois, des empereurs, des ambassadeurs, des gouvernements, etc.

Mais la Révolution supprime le Protocole. Napoléon le rétablit. C’est d’ailleurs lui qui crée la première liste rationnelle des préséances. Le décret du 13 juillet 1804 définit en effet les honneurs militaires, civils et funéraires à prodiguer aux diverses autorités. Il reste en vigueur plus d'un siècle, malgré les nombreux changements de régime.

En 1833, le service du Protocole est créé et l’Introducteur des ambassadeurs devient alors chef du Protocole.

Par un décret du 16 juin 1907, soumis par Clemenceau à la signature du président Armand Fallières, la IIIe République adapte enfin le texte à la nouvelle période institutionnelle, tout en reprenant le plan et la présentation du décret impérial. Le Cérémonial et le Protocole sont désormais réunis.

Ce n’est que quatre-vingt-deux ans et deux Républiques plus tard, que la France se dote d’un nouveau protocole. À la demande du président de la République François Mitterrand, Jacques Gandoin, professeur de droit public à la Sorbonne et ancien préfet, rédige le décret du 13 septembre 1989, relatif «aux cérémonies publiques, aux préséances, aux honneurs civils et militaires». L’ancien protocole n’avait été que légèrement modifié en 1958 à la demande du Général de Gaulle lors de la constitution de la Vème République. Il sera légèrement aménagé en 1995.

Malgré les apparences, le protocole n'est donc pas la quintessence d'un ordre politique intemporel. En réalité, son usage s'est souvent adapté aux intérêts stratégiques des gouvernants. Seul l'attrait de la mise en scène du pouvoir est une constante historique, explique Yves Deloye, professeur de sciences politiques à l'université de Strasbourg et animateur d'un colloque sur le sujet en 1996.

Le Général de Gaulle, par exemple, avait le sentiment d'incarner la France et s’imposait des règles d’une grande rigueur militaire. « Une discipline de fer », commente, dans un livre de souvenirs, Jean-Paul Alexis, ministre plénipotentiaire à la retraite, qui servit au protocole entre 1960 et 1964. Chaque sortie de bureau du Général était un acte protocolaire, pour des démarches précises liées à sa fonction et programmées à la minute près.  Selon Jean-Paul Alexis, en dix ans, il n’a jamais franchi la porte qui faisait antichambre avec son plus proche collaborateur. Il sonnait ses lieutenants... Trois boutons aux timbres différents servaient à appeler l'aide de camp, le directeur de cabinet ou le secrétaire général.

François Mitterrand était moins rigoureux.  Il déjeunait régulièrement avec ses collaborateurs par exemple ; et c'est sous sa première présidence que la réforme du décret protocolaire a été lancée.  Cependant, il ne détestait pas la distance créée par le protocole. Il y voyait la quintessence du savoir-vivre. Il a d’ailleurs maintenu, au grand dam de ses Premiers ministres, le cérémonial à l'aéroport, imposant la présence de ces derniers ou d'autres membres du gouvernement à ses départs pour l'étranger et à ses retours.

Jacques Chirac a, en revanche, supprimé cette pratique. Tout comme l'ancien maire de Paris a tenu à assouplir certains usages particulièrement gênants pour la circulation automobile des Parisiens. Les escortes de motards ont ainsi été supprimées pour les personnalités françaises et réduites pour les visiteurs étrangers. De même, le dépôt d'une gerbe sur la tombe du Soldat inconnu n'est plus qu'une étape facultative lors des visites d'Etat.

Par ailleurs, le 17 mai 1995, dès sa cérémonie d'investiture à l'Arc de triomphe, le naturel jovial de Chirac en public l'a emporté sur le strict protocole. Au lieu de remonter dans sa voiture après le salut aux anciens combattants, comme prévu, Chirac a traversé la place pour son premier bain de foule de président.

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Ses missions:

Le service du Protocole est une direction forte d’une centaine d’agents avec, à sa tête, le chef du Protocole, introducteur des Ambassadeurs, qui a lui-même rang d’Ambassadeur.

Le protocole traduit en termes concrets et pratiques l’organisation des services de l’Etat. Lorsqu'une porte est ouverte, il faut savoir qui passe le premier, sinon c'est la bousculade. Avec le Protocole, chacun connaît sa place. Depuis l'Antiquité, on pourrait résumer l'histoire du protocole à cette règle de bon sens. Des pharaons à nos jours, à toutes les époques et dans tous les pays, un protocole a déterminé la place et le comportement des individus ayant un rang élevé dans la société.

Contrairement à certains autres pays, souvent des royautés, la France a un seul protocole, logé au Quai d’Orsay avec une petite antenne à l’Elysée (la cellule protocole de la Présidence de la République). Le Cérémonial de la République est donc sous la responsabilité du service du Protocole du ministère des Affaires étrangères et européennes. Ce dernier est divisé en cinq sous-directions.

La sous-direction du cérémonial a deux fonctions principales, celle d’accompagner le Président, le Premier Ministre et le ministre des Affaires étrangères et européennes à l’étranger, et celle d’accueillir les personnalités étrangères en France…tout en assurant le respect du protocole.

L’organisation des visites en France, des voyages à l’étranger, des conférences et sommets internationaux constituent, en effet, l’essentiel du travail de la sous-direction. Cette mission est compliquée et importante car ces événements, qui participent à la projection de l’influence et de l’image de la France,  doivent combiner sur une très courte durée  entretiens de fond, engagements officiels, rencontres avec les Français de l’étranger, les milieux économiques, les assemblées parlementaires, conférences de presse et entretiens télévisés.

La sous-direction doit aussi faire en sorte d’éviter des surprises généralement malencontreuses aux hommes politiques, leur épargner des fatigues inutiles, prévoir par exemple des temps de détente, et traduire en termes concrets les objectifs politiques ou économiques de la visite sous l’oeil des médias.

Le Protocole français distingue quatre catégories de visites : les visites d’Etat, les visites officielles, les visites de travail ainsi que les visites privées. La sous-direction du cérémonial propose le degré de classification de la visite, qui est ensuite approuvé par la Présidence de la République. L’organisation de la visite et le type d’honneurs qui seront rendus au visiteur étranger dépendent de cette classification.

Pour une visite d’Etat par exemple, lorsque le Président se déplace à l’étranger, une mission préparatoire est généralement envoyée trois semaines avant la date fixée, avec un médecin, un représentant du service de presse et l’aide de camp, plus particulièrement chargé des transports. On négocie avec le protocole du pays concerné. L’ambassade et les consulats sont la cheville ouvrière du projet et le Protocole le point de convergence des différents "corps de métier". Une visite brève comme à Bruxelles où tout est déjà organisé n’est pas traitée de la même manière  qu’un voyage vers un nouveau pays ou celle avec une grosse délégation. Dans ce cas, il faut gérer avec tact l’ego des hautes personnalités invitées.

Lorsque le Président se déplace en avion, le protocole veille à ce que chacune des 150 à 200 personnes qui l’accompagne trouve sa place en fonction de son rang et convie discrètement, à la demande du Président, tel ou tel groupe a un repas. Il faut aussi gérer les épouses qui ont un programme à part, bien que, économies obligent, celles-ci sont de moins en moins conviées.

Une fois sur place, le Chef du Protocole ou son adjoint précèdent la personnalité, lui montre discrètement le chemin. Mais le protocole n’est pas figé. Le service du protocole doit être réactif, il doit utiliser le bon sens et prendre en compte les particularités locales. Le protocole local sert de bouée de sauvetage.

Lors des visites d’Etat en France, la partie protocolaire l’emporte sur le fond. Les marques de la relation privilégiée doivent être très visibles. L’accueil à l’aéroport est imposant (membre du gouvernement au pied de l’échelle, tapis rouge, plusieurs centaines de militaires en grande tenue, hélicoptère jusqu’aux Invalides, escorte à cheval vers l’Elysée et Marigny). La visite d’Etat commence toujours un lundi à la mi-journée. Le Secrétaire général de la présidence vient chercher l’hôte à Marigny et le conduit pour un entretien à l’Elysée, puis un grand dîner. Le mardi, montée et descente des Champs-Elysées, dépôt de gerbe, déjeuner chez le Premier ministre, puis, réceptions à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Le protocole évolue avec le temps. Ainsi, lors de la visite des rois d’Espagne à Paris, certains convives du déjeuner offert par le Premier ministre ne portaient pas de cravate. C’était des artistes et personne ne les a envoyés se rhabiller ! Il faut aussi tenir compte de ce que les relations personnelles sont plus proches qu’autrefois. Certains invités, au dîner donné en l’honneur de M. Berlusconi à l’Elysée, ont été un peu étonnés de trouver des tagliatelles dans leur assiette. Un ordre express du Président, sans doute à la suite d’une plaisanterie avec son hôte. Cependant, même si certains aspects du protocole ont changé, le protocole est toujours indispensable car les relations internationales sont des relations avant tout institutionnelles, éventuellement renforcées par les relations personnelles.

Un cran au-dessous, la visite officielle dure moins longtemps et le protocole est allégé. Les visites de travail se limitent à des entretiens politiques, suivis d'un déjeuner. Pour les visites privées, le protocole est réduit au minimum. Dans tous les cas, les modalités sont convenues à l'avance entre la puissance invitante et l'ambassade étrangère. Liste et cartons d'invitation, plan de table, cadeaux : rien n'est laissé à l'improvisation. De l'accueil de l'hôte à son départ, tous les déplacements sont calculés minute par minute. Notamment pour des raisons de sécurité.

La sous-direction du cérémonial est également responsable des questions de préséance (droit de précéder les autres dans une hiérarchie honorifique) dans les cérémonies officielles définies dans le décret n°89-655 du 13 septembre 1989 relatif aux cérémonies publiques, préséances, honneurs civils et militaires modifié.  En d’autres termes, elle est responsable de l’organisation (lieu, déroulement, invitations...) et des placements lors des cérémonies officielles (fête nationale, 8 mai, obsèques nationales, investiture...).

Du gouvernement au commissaire de police, en passant par le grand chancelier de la Légion d'honneur à Paris, par le président du conseil régional en province, ou par les chefs coutumiers en Nouvelle-Calédonie, toutes les autorités exerçant une fonction publique «prennent place dans l'ordre déterminé par leur rang dans l'ordre des préséances», dit le décret. Il est de règle que le plus ancien dans la fonction ou le grade le plus élevé passe avant ses pairs. A égalité de grade et d'ancienneté, c'est le plus âgé qui a la préséance. Le président d'un petit pays passe théoriquement avant celui d'une grande puissance s'il est en fonction depuis plus longtemps. L'autorité qui a la préséance arrive la dernière et se retire la première. A sa droite se trouve celle qui occupe le deuxième rang et à sa gauche, celle qui occupe le troisième, etc.

Au premier rang, bien sûr, le président de la République, suivi du Premier ministre, puis du président du Sénat (car il assure l'intérim du président) ; vient ensuite le président de l'Assemblée nationale (mais les députés ont préséance sur les sénateurs).

Avant la défaite de Valéry Giscard d'Estaing en 1981, la question de la place des anciens présidents ne s'était pas vraiment posée. Mais VGE est réputé pour être sourcilleux sur son rang. Les anciens présidents sont désormais le cinquième personnage de l'Etat.

Ces hiérarchies, dont la plupart sont fondées sur la coutume et les traditions, peuvent paraître désuètes et vaniteuses, mais elles sont indispensables au fonctionnement harmonieux des pouvoirs publics. Elles peuvent éviter quelques vexations et obligent à une courtoisie qui donne au citoyen une image respectable de l'Etat. Il est rare que des personnes tentent de jouer des coudes.

Par ailleurs, la sous-direction du cérémonial coordonne le processus d’accréditation des ambassadeurs étrangers avec la cellule protocole de la Présidence de la République. Elle les accueille et organise, la cérémonie de remise des lettres de créance. Elle établit également les lettres de créance des ambassadeurs français et les commissions consulaires des consuls généraux et consuls. Elle prépare  aussi les pouvoirs pour signer les traités et accords internationaux, ainsi que les lettres patentes de ratification des traités.

Les sous-directions des Privilèges et immunités diplomatiques et consulaires ont, quant à elles, pour objectif premier de faire respecter les Conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires de 1961 et 1963, la « Bible » de tout membre du Protocole.

En effet, outre la reconnaissance du statut des agents diplomatiques et consulaires, le droit international coutumier prévoit pour ces derniers des privilèges et immunités, « de manière à leur permettre d’effectuer leur mission au sein de l’Etat d’accueil hors de toute contrainte (de nature judiciaire, policière ou fiscale), en leur qualité d’envoyés officiels d’un Etat souverain ». Ces usages ont été codifiés dans les Conventions de Vienne, qui précisent aussi que toute personne bénéficiant de ces privilèges et immunités ont le devoir de respecter les lois et règlements de l’Etat-hôte.

On ne peut donc pas forcer un diplomate à payer son loyer. S’il y a offense grave, l’agent est discrètement incité à quitter le territoire. Selon la tradition française, les litiges sont de préférence réglés à l’amiable. Les cas de "Persona non grata" sont rares. Mieux vaut un arrangement discret qu’une mauvaise polémique de presse.

Par ailleurs, les Accords de siège passés entre la France et les Organisations internationales présentes sur son territoire telles que l’UNESCO et l’OCDE s’inspirent des dispositions contenues dans ces deux textes. En France, l’établissement de privilèges ou d’immunités est d’ordre législatif. Les conventions internationales et accords de siège sont ratifiés par le Parlement.

Ainsi, la sous-direction des Privilèges et immunités diplomatiques traite de toute question relative aux privilèges et immunités des missions diplomatiques étrangères, des organisations internationales, des représentations permanentes auprès d’elles et de leurs personnels. Les chefs de mission diplomatique,  les agents diplomatiques ou les membres des représentations auprès des organisations internationales assimilés à des diplomates,  et les fonctionnaires internationaux assimilés aux chefs de mission diplomatique ou aux agents diplomatiques dépendent d’elle.

La sous-direction des privilèges et immunités consulaires, elle, traite de toute question relative aux privilèges et immunités des postes consulaires étrangers de plein exercice et honoraires, du personnel administratif et technique, du personnel de service et du personnel privé des missions diplomatiques, des organisations internationales et des représentations permanentes auprès d’elles, ainsi que des postes consulaires. C’est elle qui prépare l’exequatur accordé aux chefs de postes consulaires et aux agents consulaires étrangers en France. Elle traite aussi du statut de certains fonctionnaires étrangers en mission en France et des fonctionnaires internationaux.

Les deux sous-directions établissent également la liste diplomatique qui fixe l’ordre de préséance au sein du corps diplomatique.

Elles gèrent aussi les dossiers de demande de visas diplomatiques et l’établissement des titres de séjour spéciaux des agents diplomatiques et de leurs ayants droit. Elles s’occupent des immunités des personnels et des locaux des missions, des accréditations des attachés de défense, de la fiscalité et des questions douanières. Elles sont également responsables des contentieux, des actes judiciaires, des questions juridiques et sociales ; ainsi que des demandes d’autorisation de port d’arme des officiers de sécurité accompagnant les personnalités étrangères, des demandes de dossiers de badges permanents d’accès aux zones réglementées des aéroports et même des questions d’urbanisme.

En 2011 en France, le personnel diplomatique et consulaire étranger compte 35.000 personnes, 200 organisations internationales sont représentées et 8.000 personnes sont renouvelées chaque année avec des immunités diplomatiques variées dont les autorités policières et judiciaires doivent être informées.

Le service du Protocole est également composé d’une sous-direction de la logistique, de l’interprétation et de la traduction. Celle-ci est notamment chargée des aspects logistiques, financiers et administratifs des visites et des conférences internationales en France comme à l’étranger.

Elle est également responsable, comme son nom l’indique, de l’interprétation et de la traduction pour les plus hautes autorités de l’Etat, en particulier pour la Présidence de la République, le Premier ministre et le ministère des Affaires étrangères et européennes.

Elle assure ainsi un service d’interprétation et de traduction et la révision des traductions des documents de politique internationale et de tout papier officiel transmis par les services de l’administration centrale, à la demande des plus hautes autorités de l’Etat ou lors des conférences internationales. Elle vérifie aussi la concordance des versions linguistiques des accords internationaux de la France.

L’instruction des propositions de nomination à une distinction honorifique des Français résidant à l’étranger et des ressortissants étrangers est également confiée au service du Protocole, et plus particulièrement au bureau des distinctions honorifiques.

Il est donc responsable des propositions de nomination dans les ordres nationaux ou ministériels, ainsi que la préparation des décrets de nomination dans la Légion d’honneur et l’ordre national du Mérite.

Seul le ministère des Affaires étrangères et européennes (Protocole et cabinet de chaque ministre délégué) a vocation à proposer au Président de la République la nomination d’étrangers dans les ordres nationaux.

Le bureau des distinctions honorifiques est également en charge des décorations échangées lors de visites d’État, ainsi que de celles octroyées aux diplomates et attachés de défense étrangers arrivés au terme de leur mission en France, sous réserve de réciprocité. Il demande, par ailleurs, l’avis des autorités concernées, généralement les postes diplomatiques et consulaires et les préfectures, pour l’attribution de décorations étrangères à des Français.

Selon le Quai d’Orsay, « sont ainsi décorés chaque année, au titre du seul Protocole, environ 120 étrangers et une centaine de Français dans la Légion d’honneur, 200 à 250 étrangers et presque autant de Français dans l’ordre national du Mérite. »

Malgré son appellation un peu vieillotte, le Bureau des Distinctions honorifiques, joue un rôle important. La France utilise, en effet, ses décorations, pour créer un réseau d’influence avec les récipiendaires et leurs amis, avec qui elle garde des relations privilégiées.

 

Cependant, on a vu que cette stratégie de l’Etat français d'échanger le prestige de ses décorations contre la promotion de ses propres intérêts peut parfois laisser des tâches indélébiles sur l'honneur national.

La Légion d'honneur accordée à Abdul Razak Baginda, un proche du pouvoir malaisien un temps accusé d'avoir commandité le meurtre de son ancienne maîtresse, par exemple, doit sans doute davantage à son rôle dans un contrat de vente de deux sous-marins franco-espagnols à Kuala Lumpur qu'à sa passion pour Napoléon.

Et comme l’explique Laurent Stefanini, chef du protocole au ministère des Affaires étrangères, les décorations accordées aux étrangers ne sont qu'honorifiques. Comme ils ne rentrent pas formellement dans l'ordre, on ne peut les en exclure.  Mais une récente modification du code de la Légion d'honneur va mettre fin à cette anomalie. La toute première de ces déchéances devrait frapper le général Manuel Noriega, l'ancien dictateur panaméen élevé au grade de commandeur, en 1987, par François Mitterrand, et qui a été condamné à Paris pour blanchiment d'argent provenant du trafic de drogue.

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Où va l’argent:

Les crédits accordés au Protocole sont inscrits dans le programme 105 intitulé « Action de la France en Europe et dans le monde » du ministère des affaires étrangères et européennes et qui ont vocation à soutenir l’action diplomatique.

L’action « Coordination de l’action diplomatique » du programme regroupe également les crédits mis en œuvre à l’initiative directe des autorités politiques, c’est-a-dire du cabinet du ministre, l’Hôtel du Ministre, de la Direction de la communication et du porte-parolat. Elle inclut également les crédits de sécurité des communautés françaises à l’étranger affectés au Centre de crise (CDC).

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Polémiques:

Nicolas Sarkozy ne semble pas être un grand fan du protocole. Depuis son élection, il a volontairement écorné les règles. En septembre 2008 par exemple, il décide d’accueillir le Pape Benoît XVI sur le tarmac de l’aéroport d’Orly alors que le protocole prévoit habituellement que ce soit le premier ministre qui accueille l’hôte pour ensuite l’accompagner à l’Élysée.

Le Président semble en effet vouloir donner une image totalement différente de ses prédécesseurs, plus proche du peuple. Il prône la rupture. Il ne cesse de court-circuiter les distances, les protocoles. Certains disent même que l’on assiste à une désacralisation, à la « pipolisation » de la fonction présidentielle. Il n’hésite pas à user d’un langage vif et direct.

On adhère ou pas mais à force de ne pas suivre le protocole, Nicolas Sarkozy a commis de nombreux dérapages et maladresses. Comme lorsqu’en 2008, il perd son sang froid au Salon de l’Agriculture et dit à un homme qui refuse de lui serrer la main :"Casse toi, pauvre con !" Ces quelques mots ont provoqué un scandale dans l’hexagone et ont d’ailleurs aujourd’hui droit à une page entière sur Wikipédia.

En 2008 également, alors qu’il est l'invité d'honneur des cérémonies du Jour de la République en Inde, Nicolas Sarkozy embarrasse les services du protocole indiens. Jusqu’au dernier moment, le Président laisse planer le mystère au-dessus de la présence - ou non - de Carla Bruni, qui n’est alors que sa petite amie. Or, les Indiens ne souhaitaient pas la recevoir, l'ex top-model n'ayant pas de statut officiel. Le ministère indien des Affaires étrangères s'interroge sur la place à donner à Carla Bruni dans le protocole car celle-ci ne pourrait accompagner M. Sarkozy dans une cérémonie officielle, car une petite amie n'est pas considérée comme une épouse. Le  protocole est d’ailleurs le même (ou presque) en France et en Europe La situation fait la une des journaux. Finalement, Sarkozy décide de ne pas emmener Carla Bruni mais écourte son séjour de 5 jours à 39 heures, vexant les autorités indiennes.

En 2009, il oublie de convier la Reine Elisabeth II à la cérémonie du 65eme anniversaire du débarquement en Normandie, s’attirant la foudre de cette dernière ainsi que des tabloïds anglais.

En février 2011, c’est la Turquie qu’il met en colère. Le maire d'Ankara Melih Gokcek accuse le Président de lui avoir manquer de respect en se permettant de mâcher un chewing-gum alors que ce dernier l’accueillait à l'aéroport. Le maire faisait en effet partie de la délégation qui a accueilli et raccompagné le président français à l'aéroport lors de sa visite éclair en Turquie dans le cadre de la présidence française du G20.

Le maire décide alors de faire de même lorsque le Président est raccompagné à l’aéroport: «  Il fallait que quelqu'un réagisse et je pense avoir répondu avec diplomatie. En la matière, il y a quelque chose que l'on appelle la réciprocité", a-t-il ajouté.

 

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Le service du Protocole, créé au XIXe siècle et attaché au ministère des Affaires étrangères et européennes ainsi qu’à l'Elysée met en oeuvre des règles écrites qui déterminent ce qui doit être fait pour respecter l'étiquette dans toutes les situations. Hérité de l'Ancien Régime, il fixe avec minutie la préséance, le cérémonial et les us et coutumes du pouvoir français (y compris les immunités et les privilèges des diplomates, ainsi que certaines distinctions honorifiques) et intervient dans l'organisation des déplacements à l'étranger du président de la République, du Premier ministre, des membres du gouvernement, ainsi que dans l'organisation des visites de chefs d'Etat et de personnalités étrangères en France.

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Histoire:

De l’Antiquité à nos jours, à toutes les époques et dans tous les pays, un protocole a déterminé la place et le comportement des individus ayant un rang élevé dans la société. En France, les hommes politiques ont toujours accordé une attention particulière aux préséances et honneurs qui leur sont dus.

Les rois de France signèrent de nombreux textes. Au milieu du XVIe siècle, l'édit d'Henri II, notamment, accorde aux princes du sang la préséance sur les autres princes et pairs de France dans toutes les solennités publiques.

Cependant, la date officielle de naissance du Protocole est 1585, date qui correspond à une première codification des échanges diplomatiques. La première charge d’Introducteur des ambassadeurs est alors confiée à Jérôme de Gondi par Henri III.

En 1649 paraît le Cérémonial français. Ce livre de plus de 2 000 pages décrit en détails tous les usages concernant l'ordonnancement des sacres et des couronnements, de même que les entrées solennelles dans les villes, les mariages, les naissances, les Te Deum, les réceptions du pape, des rois, des empereurs, des ambassadeurs, des gouvernements, etc.

Mais la Révolution supprime le Protocole. Napoléon le rétablit. C’est d’ailleurs lui qui crée la première liste rationnelle des préséances. Le décret du 13 juillet 1804 définit en effet les honneurs militaires, civils et funéraires à prodiguer aux diverses autorités. Il reste en vigueur plus d'un siècle, malgré les nombreux changements de régime.

En 1833, le service du Protocole est créé et l’Introducteur des ambassadeurs devient alors chef du Protocole.

Par un décret du 16 juin 1907, soumis par Clemenceau à la signature du président Armand Fallières, la IIIe République adapte enfin le texte à la nouvelle période institutionnelle, tout en reprenant le plan et la présentation du décret impérial. Le Cérémonial et le Protocole sont désormais réunis.

Ce n’est que quatre-vingt-deux ans et deux Républiques plus tard, que la France se dote d’un nouveau protocole. À la demande du président de la République François Mitterrand, Jacques Gandoin, professeur de droit public à la Sorbonne et ancien préfet, rédige le décret du 13 septembre 1989, relatif «aux cérémonies publiques, aux préséances, aux honneurs civils et militaires». L’ancien protocole n’avait été que légèrement modifié en 1958 à la demande du Général de Gaulle lors de la constitution de la Vème République. Il sera légèrement aménagé en 1995.

Malgré les apparences, le protocole n'est donc pas la quintessence d'un ordre politique intemporel. En réalité, son usage s'est souvent adapté aux intérêts stratégiques des gouvernants. Seul l'attrait de la mise en scène du pouvoir est une constante historique, explique Yves Deloye, professeur de sciences politiques à l'université de Strasbourg et animateur d'un colloque sur le sujet en 1996.

Le Général de Gaulle, par exemple, avait le sentiment d'incarner la France et s’imposait des règles d’une grande rigueur militaire. « Une discipline de fer », commente, dans un livre de souvenirs, Jean-Paul Alexis, ministre plénipotentiaire à la retraite, qui servit au protocole entre 1960 et 1964. Chaque sortie de bureau du Général était un acte protocolaire, pour des démarches précises liées à sa fonction et programmées à la minute près.  Selon Jean-Paul Alexis, en dix ans, il n’a jamais franchi la porte qui faisait antichambre avec son plus proche collaborateur. Il sonnait ses lieutenants... Trois boutons aux timbres différents servaient à appeler l'aide de camp, le directeur de cabinet ou le secrétaire général.

François Mitterrand était moins rigoureux.  Il déjeunait régulièrement avec ses collaborateurs par exemple ; et c'est sous sa première présidence que la réforme du décret protocolaire a été lancée.  Cependant, il ne détestait pas la distance créée par le protocole. Il y voyait la quintessence du savoir-vivre. Il a d’ailleurs maintenu, au grand dam de ses Premiers ministres, le cérémonial à l'aéroport, imposant la présence de ces derniers ou d'autres membres du gouvernement à ses départs pour l'étranger et à ses retours.

Jacques Chirac a, en revanche, supprimé cette pratique. Tout comme l'ancien maire de Paris a tenu à assouplir certains usages particulièrement gênants pour la circulation automobile des Parisiens. Les escortes de motards ont ainsi été supprimées pour les personnalités françaises et réduites pour les visiteurs étrangers. De même, le dépôt d'une gerbe sur la tombe du Soldat inconnu n'est plus qu'une étape facultative lors des visites d'Etat.

Par ailleurs, le 17 mai 1995, dès sa cérémonie d'investiture à l'Arc de triomphe, le naturel jovial de Chirac en public l'a emporté sur le strict protocole. Au lieu de remonter dans sa voiture après le salut aux anciens combattants, comme prévu, Chirac a traversé la place pour son premier bain de foule de président.

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Ses missions:

Le service du Protocole est une direction forte d’une centaine d’agents avec, à sa tête, le chef du Protocole, introducteur des Ambassadeurs, qui a lui-même rang d’Ambassadeur.

Le protocole traduit en termes concrets et pratiques l’organisation des services de l’Etat. Lorsqu'une porte est ouverte, il faut savoir qui passe le premier, sinon c'est la bousculade. Avec le Protocole, chacun connaît sa place. Depuis l'Antiquité, on pourrait résumer l'histoire du protocole à cette règle de bon sens. Des pharaons à nos jours, à toutes les époques et dans tous les pays, un protocole a déterminé la place et le comportement des individus ayant un rang élevé dans la société.

Contrairement à certains autres pays, souvent des royautés, la France a un seul protocole, logé au Quai d’Orsay avec une petite antenne à l’Elysée (la cellule protocole de la Présidence de la République). Le Cérémonial de la République est donc sous la responsabilité du service du Protocole du ministère des Affaires étrangères et européennes. Ce dernier est divisé en cinq sous-directions.

La sous-direction du cérémonial a deux fonctions principales, celle d’accompagner le Président, le Premier Ministre et le ministre des Affaires étrangères et européennes à l’étranger, et celle d’accueillir les personnalités étrangères en France…tout en assurant le respect du protocole.

L’organisation des visites en France, des voyages à l’étranger, des conférences et sommets internationaux constituent, en effet, l’essentiel du travail de la sous-direction. Cette mission est compliquée et importante car ces événements, qui participent à la projection de l’influence et de l’image de la France,  doivent combiner sur une très courte durée  entretiens de fond, engagements officiels, rencontres avec les Français de l’étranger, les milieux économiques, les assemblées parlementaires, conférences de presse et entretiens télévisés.

La sous-direction doit aussi faire en sorte d’éviter des surprises généralement malencontreuses aux hommes politiques, leur épargner des fatigues inutiles, prévoir par exemple des temps de détente, et traduire en termes concrets les objectifs politiques ou économiques de la visite sous l’oeil des médias.

Le Protocole français distingue quatre catégories de visites : les visites d’Etat, les visites officielles, les visites de travail ainsi que les visites privées. La sous-direction du cérémonial propose le degré de classification de la visite, qui est ensuite approuvé par la Présidence de la République. L’organisation de la visite et le type d’honneurs qui seront rendus au visiteur étranger dépendent de cette classification.

Pour une visite d’Etat par exemple, lorsque le Président se déplace à l’étranger, une mission préparatoire est généralement envoyée trois semaines avant la date fixée, avec un médecin, un représentant du service de presse et l’aide de camp, plus particulièrement chargé des transports. On négocie avec le protocole du pays concerné. L’ambassade et les consulats sont la cheville ouvrière du projet et le Protocole le point de convergence des différents "corps de métier". Une visite brève comme à Bruxelles où tout est déjà organisé n’est pas traitée de la même manière  qu’un voyage vers un nouveau pays ou celle avec une grosse délégation. Dans ce cas, il faut gérer avec tact l’ego des hautes personnalités invitées.

Lorsque le Président se déplace en avion, le protocole veille à ce que chacune des 150 à 200 personnes qui l’accompagne trouve sa place en fonction de son rang et convie discrètement, à la demande du Président, tel ou tel groupe a un repas. Il faut aussi gérer les épouses qui ont un programme à part, bien que, économies obligent, celles-ci sont de moins en moins conviées.

Une fois sur place, le Chef du Protocole ou son adjoint précèdent la personnalité, lui montre discrètement le chemin. Mais le protocole n’est pas figé. Le service du protocole doit être réactif, il doit utiliser le bon sens et prendre en compte les particularités locales. Le protocole local sert de bouée de sauvetage.

Lors des visites d’Etat en France, la partie protocolaire l’emporte sur le fond. Les marques de la relation privilégiée doivent être très visibles. L’accueil à l’aéroport est imposant (membre du gouvernement au pied de l’échelle, tapis rouge, plusieurs centaines de militaires en grande tenue, hélicoptère jusqu’aux Invalides, escorte à cheval vers l’Elysée et Marigny). La visite d’Etat commence toujours un lundi à la mi-journée. Le Secrétaire général de la présidence vient chercher l’hôte à Marigny et le conduit pour un entretien à l’Elysée, puis un grand dîner. Le mardi, montée et descente des Champs-Elysées, dépôt de gerbe, déjeuner chez le Premier ministre, puis, réceptions à l’Assemblée nationale et au Sénat.

Le protocole évolue avec le temps. Ainsi, lors de la visite des rois d’Espagne à Paris, certains convives du déjeuner offert par le Premier ministre ne portaient pas de cravate. C’était des artistes et personne ne les a envoyés se rhabiller ! Il faut aussi tenir compte de ce que les relations personnelles sont plus proches qu’autrefois. Certains invités, au dîner donné en l’honneur de M. Berlusconi à l’Elysée, ont été un peu étonnés de trouver des tagliatelles dans leur assiette. Un ordre express du Président, sans doute à la suite d’une plaisanterie avec son hôte. Cependant, même si certains aspects du protocole ont changé, le protocole est toujours indispensable car les relations internationales sont des relations avant tout institutionnelles, éventuellement renforcées par les relations personnelles.

Un cran au-dessous, la visite officielle dure moins longtemps et le protocole est allégé. Les visites de travail se limitent à des entretiens politiques, suivis d'un déjeuner. Pour les visites privées, le protocole est réduit au minimum. Dans tous les cas, les modalités sont convenues à l'avance entre la puissance invitante et l'ambassade étrangère. Liste et cartons d'invitation, plan de table, cadeaux : rien n'est laissé à l'improvisation. De l'accueil de l'hôte à son départ, tous les déplacements sont calculés minute par minute. Notamment pour des raisons de sécurité.

La sous-direction du cérémonial est également responsable des questions de préséance (droit de précéder les autres dans une hiérarchie honorifique) dans les cérémonies officielles définies dans le décret n°89-655 du 13 septembre 1989 relatif aux cérémonies publiques, préséances, honneurs civils et militaires modifié.  En d’autres termes, elle est responsable de l’organisation (lieu, déroulement, invitations...) et des placements lors des cérémonies officielles (fête nationale, 8 mai, obsèques nationales, investiture...).

Du gouvernement au commissaire de police, en passant par le grand chancelier de la Légion d'honneur à Paris, par le président du conseil régional en province, ou par les chefs coutumiers en Nouvelle-Calédonie, toutes les autorités exerçant une fonction publique «prennent place dans l'ordre déterminé par leur rang dans l'ordre des préséances», dit le décret. Il est de règle que le plus ancien dans la fonction ou le grade le plus élevé passe avant ses pairs. A égalité de grade et d'ancienneté, c'est le plus âgé qui a la préséance. Le président d'un petit pays passe théoriquement avant celui d'une grande puissance s'il est en fonction depuis plus longtemps. L'autorité qui a la préséance arrive la dernière et se retire la première. A sa droite se trouve celle qui occupe le deuxième rang et à sa gauche, celle qui occupe le troisième, etc.

Au premier rang, bien sûr, le président de la République, suivi du Premier ministre, puis du président du Sénat (car il assure l'intérim du président) ; vient ensuite le président de l'Assemblée nationale (mais les députés ont préséance sur les sénateurs).

Avant la défaite de Valéry Giscard d'Estaing en 1981, la question de la place des anciens présidents ne s'était pas vraiment posée. Mais VGE est réputé pour être sourcilleux sur son rang. Les anciens présidents sont désormais le cinquième personnage de l'Etat.

Ces hiérarchies, dont la plupart sont fondées sur la coutume et les traditions, peuvent paraître désuètes et vaniteuses, mais elles sont indispensables au fonctionnement harmonieux des pouvoirs publics. Elles peuvent éviter quelques vexations et obligent à une courtoisie qui donne au citoyen une image respectable de l'Etat. Il est rare que des personnes tentent de jouer des coudes.

Par ailleurs, la sous-direction du cérémonial coordonne le processus d’accréditation des ambassadeurs étrangers avec la cellule protocole de la Présidence de la République. Elle les accueille et organise, la cérémonie de remise des lettres de créance. Elle établit également les lettres de créance des ambassadeurs français et les commissions consulaires des consuls généraux et consuls. Elle prépare  aussi les pouvoirs pour signer les traités et accords internationaux, ainsi que les lettres patentes de ratification des traités.

Les sous-directions des Privilèges et immunités diplomatiques et consulaires ont, quant à elles, pour objectif premier de faire respecter les Conventions de Vienne sur les relations diplomatiques et consulaires de 1961 et 1963, la « Bible » de tout membre du Protocole.

En effet, outre la reconnaissance du statut des agents diplomatiques et consulaires, le droit international coutumier prévoit pour ces derniers des privilèges et immunités, « de manière à leur permettre d’effectuer leur mission au sein de l’Etat d’accueil hors de toute contrainte (de nature judiciaire, policière ou fiscale), en leur qualité d’envoyés officiels d’un Etat souverain ». Ces usages ont été codifiés dans les Conventions de Vienne, qui précisent aussi que toute personne bénéficiant de ces privilèges et immunités ont le devoir de respecter les lois et règlements de l’Etat-hôte.

On ne peut donc pas forcer un diplomate à payer son loyer. S’il y a offense grave, l’agent est discrètement incité à quitter le territoire. Selon la tradition française, les litiges sont de préférence réglés à l’amiable. Les cas de "Persona non grata" sont rares. Mieux vaut un arrangement discret qu’une mauvaise polémique de presse.

Par ailleurs, les Accords de siège passés entre la France et les Organisations internationales présentes sur son territoire telles que l’UNESCO et l’OCDE s’inspirent des dispositions contenues dans ces deux textes. En France, l’établissement de privilèges ou d’immunités est d’ordre législatif. Les conventions internationales et accords de siège sont ratifiés par le Parlement.

Ainsi, la sous-direction des Privilèges et immunités diplomatiques traite de toute question relative aux privilèges et immunités des missions diplomatiques étrangères, des organisations internationales, des représentations permanentes auprès d’elles et de leurs personnels. Les chefs de mission diplomatique,  les agents diplomatiques ou les membres des représentations auprès des organisations internationales assimilés à des diplomates,  et les fonctionnaires internationaux assimilés aux chefs de mission diplomatique ou aux agents diplomatiques dépendent d’elle.

La sous-direction des privilèges et immunités consulaires, elle, traite de toute question relative aux privilèges et immunités des postes consulaires étrangers de plein exercice et honoraires, du personnel administratif et technique, du personnel de service et du personnel privé des missions diplomatiques, des organisations internationales et des représentations permanentes auprès d’elles, ainsi que des postes consulaires. C’est elle qui prépare l’exequatur accordé aux chefs de postes consulaires et aux agents consulaires étrangers en France. Elle traite aussi du statut de certains fonctionnaires étrangers en mission en France et des fonctionnaires internationaux.

Les deux sous-directions établissent également la liste diplomatique qui fixe l’ordre de préséance au sein du corps diplomatique.

Elles gèrent aussi les dossiers de demande de visas diplomatiques et l’établissement des titres de séjour spéciaux des agents diplomatiques et de leurs ayants droit. Elles s’occupent des immunités des personnels et des locaux des missions, des accréditations des attachés de défense, de la fiscalité et des questions douanières. Elles sont également responsables des contentieux, des actes judiciaires, des questions juridiques et sociales ; ainsi que des demandes d’autorisation de port d’arme des officiers de sécurité accompagnant les personnalités étrangères, des demandes de dossiers de badges permanents d’accès aux zones réglementées des aéroports et même des questions d’urbanisme.

En 2011 en France, le personnel diplomatique et consulaire étranger compte 35.000 personnes, 200 organisations internationales sont représentées et 8.000 personnes sont renouvelées chaque année avec des immunités diplomatiques variées dont les autorités policières et judiciaires doivent être informées.

Le service du Protocole est également composé d’une sous-direction de la logistique, de l’interprétation et de la traduction. Celle-ci est notamment chargée des aspects logistiques, financiers et administratifs des visites et des conférences internationales en France comme à l’étranger.

Elle est également responsable, comme son nom l’indique, de l’interprétation et de la traduction pour les plus hautes autorités de l’Etat, en particulier pour la Présidence de la République, le Premier ministre et le ministère des Affaires étrangères et européennes.

Elle assure ainsi un service d’interprétation et de traduction et la révision des traductions des documents de politique internationale et de tout papier officiel transmis par les services de l’administration centrale, à la demande des plus hautes autorités de l’Etat ou lors des conférences internationales. Elle vérifie aussi la concordance des versions linguistiques des accords internationaux de la France.

L’instruction des propositions de nomination à une distinction honorifique des Français résidant à l’étranger et des ressortissants étrangers est également confiée au service du Protocole, et plus particulièrement au bureau des distinctions honorifiques.

Il est donc responsable des propositions de nomination dans les ordres nationaux ou ministériels, ainsi que la préparation des décrets de nomination dans la Légion d’honneur et l’ordre national du Mérite.

Seul le ministère des Affaires étrangères et européennes (Protocole et cabinet de chaque ministre délégué) a vocation à proposer au Président de la République la nomination d’étrangers dans les ordres nationaux.

Le bureau des distinctions honorifiques est également en charge des décorations échangées lors de visites d’État, ainsi que de celles octroyées aux diplomates et attachés de défense étrangers arrivés au terme de leur mission en France, sous réserve de réciprocité. Il demande, par ailleurs, l’avis des autorités concernées, généralement les postes diplomatiques et consulaires et les préfectures, pour l’attribution de décorations étrangères à des Français.

Selon le Quai d’Orsay, « sont ainsi décorés chaque année, au titre du seul Protocole, environ 120 étrangers et une centaine de Français dans la Légion d’honneur, 200 à 250 étrangers et presque autant de Français dans l’ordre national du Mérite. »

Malgré son appellation un peu vieillotte, le Bureau des Distinctions honorifiques, joue un rôle important. La France utilise, en effet, ses décorations, pour créer un réseau d’influence avec les récipiendaires et leurs amis, avec qui elle garde des relations privilégiées.

 

Cependant, on a vu que cette stratégie de l’Etat français d'échanger le prestige de ses décorations contre la promotion de ses propres intérêts peut parfois laisser des tâches indélébiles sur l'honneur national.

La Légion d'honneur accordée à Abdul Razak Baginda, un proche du pouvoir malaisien un temps accusé d'avoir commandité le meurtre de son ancienne maîtresse, par exemple, doit sans doute davantage à son rôle dans un contrat de vente de deux sous-marins franco-espagnols à Kuala Lumpur qu'à sa passion pour Napoléon.

Et comme l’explique Laurent Stefanini, chef du protocole au ministère des Affaires étrangères, les décorations accordées aux étrangers ne sont qu'honorifiques. Comme ils ne rentrent pas formellement dans l'ordre, on ne peut les en exclure.  Mais une récente modification du code de la Légion d'honneur va mettre fin à cette anomalie. La toute première de ces déchéances devrait frapper le général Manuel Noriega, l'ancien dictateur panaméen élevé au grade de commandeur, en 1987, par François Mitterrand, et qui a été condamné à Paris pour blanchiment d'argent provenant du trafic de drogue.

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Où va l’argent:

Les crédits accordés au Protocole sont inscrits dans le programme 105 intitulé « Action de la France en Europe et dans le monde » du ministère des affaires étrangères et européennes et qui ont vocation à soutenir l’action diplomatique.

L’action « Coordination de l’action diplomatique » du programme regroupe également les crédits mis en œuvre à l’initiative directe des autorités politiques, c’est-a-dire du cabinet du ministre, l’Hôtel du Ministre, de la Direction de la communication et du porte-parolat. Elle inclut également les crédits de sécurité des communautés françaises à l’étranger affectés au Centre de crise (CDC).

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Polémiques:

Nicolas Sarkozy ne semble pas être un grand fan du protocole. Depuis son élection, il a volontairement écorné les règles. En septembre 2008 par exemple, il décide d’accueillir le Pape Benoît XVI sur le tarmac de l’aéroport d’Orly alors que le protocole prévoit habituellement que ce soit le premier ministre qui accueille l’hôte pour ensuite l’accompagner à l’Élysée.

Le Président semble en effet vouloir donner une image totalement différente de ses prédécesseurs, plus proche du peuple. Il prône la rupture. Il ne cesse de court-circuiter les distances, les protocoles. Certains disent même que l’on assiste à une désacralisation, à la « pipolisation » de la fonction présidentielle. Il n’hésite pas à user d’un langage vif et direct.

On adhère ou pas mais à force de ne pas suivre le protocole, Nicolas Sarkozy a commis de nombreux dérapages et maladresses. Comme lorsqu’en 2008, il perd son sang froid au Salon de l’Agriculture et dit à un homme qui refuse de lui serrer la main :"Casse toi, pauvre con !" Ces quelques mots ont provoqué un scandale dans l’hexagone et ont d’ailleurs aujourd’hui droit à une page entière sur Wikipédia.

En 2008 également, alors qu’il est l'invité d'honneur des cérémonies du Jour de la République en Inde, Nicolas Sarkozy embarrasse les services du protocole indiens. Jusqu’au dernier moment, le Président laisse planer le mystère au-dessus de la présence - ou non - de Carla Bruni, qui n’est alors que sa petite amie. Or, les Indiens ne souhaitaient pas la recevoir, l'ex top-model n'ayant pas de statut officiel. Le ministère indien des Affaires étrangères s'interroge sur la place à donner à Carla Bruni dans le protocole car celle-ci ne pourrait accompagner M. Sarkozy dans une cérémonie officielle, car une petite amie n'est pas considérée comme une épouse. Le  protocole est d’ailleurs le même (ou presque) en France et en Europe La situation fait la une des journaux. Finalement, Sarkozy décide de ne pas emmener Carla Bruni mais écourte son séjour de 5 jours à 39 heures, vexant les autorités indiennes.

En 2009, il oublie de convier la Reine Elisabeth II à la cérémonie du 65eme anniversaire du débarquement en Normandie, s’attirant la foudre de cette dernière ainsi que des tabloïds anglais.

En février 2011, c’est la Turquie qu’il met en colère. Le maire d'Ankara Melih Gokcek accuse le Président de lui avoir manquer de respect en se permettant de mâcher un chewing-gum alors que ce dernier l’accueillait à l'aéroport. Le maire faisait en effet partie de la délégation qui a accueilli et raccompagné le président français à l'aéroport lors de sa visite éclair en Turquie dans le cadre de la présidence française du G20.

Le maire décide alors de faire de même lorsque le Président est raccompagné à l’aéroport: «  Il fallait que quelqu'un réagisse et je pense avoir répondu avec diplomatie. En la matière, il y a quelque chose que l'on appelle la réciprocité", a-t-il ajouté.

 

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